14 octobre 2006

Lecture : Les Particules élémentaires, de Michel Houellebecq

Le seul adjectif qui convient au sentiment que j'éprouve après avoir lu cet ouvrage est : intéressant. Pourtant c'est un mot creux, vaguement prétentieux, plutôt froid ; mais la froideur, justement, c'est sûrement le thème principal du roman. Voici un passage :
"On considèr(e) le plus souvent la philosophie comme dénuée de toute importance pratique, voire d'objet. En réalité, la vision du monde la plus couramment adoptée, à un moment donné, par les membres d'une société détermine son économie, sa politique et ses moeurs. Les mutations métaphysiques _ c'est-à-dire les transformations radicales et globales de la vision du monde adoptée par le plus grand nombre _ sont rares dans l'histoire de l'humanité. Par exemple, on peut citer l'apparition du christianisme. (...) on ne peut pas dire que les mutations métaphysiques s'attaquent aux sociétés affaiblies, déjà sur le déclin. Lorsque le christianisme apparut, l'Empire romain était au faîte de sa puissance (...) Lorsque la science moderne apparut, le christianisme médiéval constituait un système complet de compréhension de l'homme et de l'univers; il servait de base de gouvernement des peuples, produisait des connaissances et des oeuvres, décidait de la paix comme de la guerre, organisait la production et la répartition des richesses; rien de tout cela ne devait l'empêcher de s'effondrer".
Cet extrait se situe dans le prologue et annonce que le récit va raconter l'émergence d'une troisième mutation métaphysique radicale, celle que nous serions en train de vivre et qui se caractériserait par un individualisme poussé à l'extrême, faisant des êtres humains des êtres froids et malheureux. Le lecteur suit la vie de deux demi-frères, l'un qui devient un grand biologiste et l'autre professeur de lettres. Les sentiments humains, tout au long du roman, sont ramenés à des considérations d'ordre biologique et ce matérialisme serait à la base d'une sorte de déshumanisation de l'humain.
Je ne peux pas dire que j'ai aimé et je ne crois pas que l'on puisse l'aimer, dans la mesure où il traite de la faillite des sentiments et qu'il ne cherche donc à susciter aucun engouement, mais au contraire à faire éprouver la grisaille des relations humaines, la dislocation des valeurs sociales. On peut le trouver dérangeant et réussi.

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